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À la découverte de nos métiers : Hugo, fauniste et naturaliste passionné

Ce métier est une passion, une vocation même : il nait d’une intarissable soif d’apprendre et d’observer, sur le terrain, les différentes espèces et leurs habitats. Sa particularité : « Il n’y a pas de formation spécifique en France pour devenir fauniste. Les formations professionnalisantes et universitaires n’ont logiquement pas le temps et la capacité humaine de former des naturalistes à la maitrise de plusieurs groupes taxonomiques. »

Il ajoute : « Les compétences naissent avant tout de l’investissement personnel dans sa passion au travers de sorties réalisées sur le terrain de façon seul et parfois accompagné d’autres passionnés. L’expérience et les connaissances s’enrichissent au fil des années grâce aux prospections, aux voyages et à l’indispensable apport de la bibliographie. » Hugo Touzé, fauniste chez Dervenn Conseils & Ingénierie, est l’un de ces passionnés qui arpentent mares, forêts ou marais et s’abreuvent de littérature — pour son travail, et pour son plaisir sur son temps personnel.

Difficile de résumer en quelques mots ses missions. Mais s’il ne fallait en présenter que trois : dresser des inventaires de terrain et des diagnostics écologiques, préconiser des mesures et des aménagements en présence d’enjeux écologiques, et rédiger des dossiers réglementaires.

Agrion de Mercure (Coenagrion mercuriale) photo Hugo Touzé
Agrion de Mercure (Coenagrion mercuriale) photo Hugo Touzé

S’adapter à l’écologie des espèces

Le planning est particulièrement chargé entre mars et juin du fait des périodes d’activité des espèces. Ces contraintes s’appliquent à bon nombre d’études, comme les études d’impact ou les plans de gestion. « Chaque espèce à des exigences écologiques qui lui sont propres. On a le devoir de réaliser nos inventaires dans les meilleures conditions possible afin de maximiser nos probabilités de détection. »

Ainsi, si l’on souhaite connaître la dynamique d’une population de Vipère péliade d’une lande, c’est entre la mi-mars et la mi-mai que l’on sera sur le terrain. À cette période, les individus sont plus visibles, car en quête de chaleur au sortir de l’hibernation et les adultes recherchent activement des partenaires sexuels. « Pour connaître qualitativement le peuplement odontologique (libellules) d’un site donné, les prospections s’échelonneront dans le temps de façon à tenir compte des différences dans la phénologie des espèces. En effet certaines réalisent leur émergence en début avril, tandis que pour d’autres, il faut attendre début juillet voire plus tard encore. »

De nuit ou de jour, en été ou en hiver… les pieds dans l’eau, dans les ronces ou à flanc de falaises. Car c’est une autre particularité du métier, « il faut avoir une bonne condition physique et s’adapter aux particularités de chaque habitat, qu’ils s’agissent de berges boisées prospectées en quête d’épreintes (crottes) de Loutre ou de coteaux boisés fréquentés par la Genette ». La contrepartie ? Explorer, toujours, de nouveaux habitats, identifier de nouveaux cortèges d’espèces, partout en France et à l’étranger. Faire des découvertes, continuer à approfondir ses connaissances dans l’identification et l’écologie des espèces observées.

Car être fauniste, c’est travailler sur un nombre important de groupes taxonomiques, des chiroptères aux micromammifères et des mollusques aux orthoptères. « On ne peut pas seulement être spécialiste d’une espèce en particulier, il faut être capable de réaliser des inventaires ornithologiques, mais aussi de détecter la présence de Vertigos Des Moulins par exemple, un petit escargot protégé de trois millimètres de long. Il est de notre responsabilité de localiser toutes les espèces rares et/ou menacées d’un écosystème, car ce dernier pourrait être impacté par un projet dans le futur. »

Criquet des salines (Epacromius tergestinus)
Criquet des salines (Epacromius tergestinus) photo Hugo Touzé

Des outils et des hommes

« Depuis une dizaine d’années, de nouveaux outils viennent compléter l’observation in situ. Ils ne la remplacent pas pour autant, mais nous permettent de comparer les résultats et nous apportent parfois des surprises. » Parmi ceux-ci, l’ADN environnemental, qui permet, en prélevant quelques litres d’eau d’une mare, de connaitre la diversité des espèces d’amphibiens qui y vit. Ou encore l’analyse acoustique, qui permet de connaitre les territoires de chasse des chauves-souris dans une zone définie, ou la diversité d’oiseaux migrateurs qui se déplacent de nuit au-dessus de ce même périmètre.

Depuis 2016, Hugo réalise trois passages nocturnes dédiés aux amphibiens sur des mares créées dans le cadre de mesures compensatoires pour la LGV Rennes-Paris. « Cela nous permet de connaître l’efficacité des mesures mises en œuvre, grâce à la comparaison des résultats des inventaires menés actuellement avec ceux menés avant la création de la LGV. »

Triton ponctué (Lissotriton vulgaris)
Triton ponctué (Lissotriton vulgaris) photo Hugo Touzé

Il ajoute : « nous avons récemment travaillé sur un projet innovant de restauration et protection d’une colonie de Guêpiers d’Europe dans l’Aisne. » C’est l’un des oiseaux les plus colorés d’Europe. Cette espèce cavernicole vit dans des terriers pouvant atteindre plus de 2 mètres de profondeur. « Une petite colonie, l’une des seules du département s’est installée il y a quelques années déjà sur un talus soumis à de nombreux facteurs perturbateurs : pression des photographes, dérangements, érosion du talus du fait de travaux agricoles, disparition des habitats favorables aux insectes qui constituent le régime alimentaire de cet oiseau. Nous avons proposé des mesures de restauration du talus et de création d’habitats afin rendre le site plus attractif et d’augmenter le succès de la nidification. » Un suivi sur plusieurs années permettra de connaître la réussite de ces aménagements.

À quoi sert un fauniste ?

Établir un inventaire des espèces sur un lieu qui ferait, par exemple, l’objet d’une déviation routière ou sur lequel un parc éolien serait implanté, vise à détecter de potentiels enjeux écologiques. Et à éviter les mauvaises surprises lors de la conception de projets… Car découvrir tardivement une espèce protégée, c’est assurément ralentir un projet ou parfois le bloquer définitivement.

Pour autant, « la perte de biodiversité est rapide. Les espèces les plus communes disparaissent rapidement, le Moineau domestique par exemple montre un déclin de ses populations de près de 75% entre 2003 et 2016 à Paris. Et cette tendance est la même pour de trop nombreuses espèces, qu’elles vivent dans des milieux urbains, boisés ou ouverts. Dans les écosystèmes agricoles, l’intensification de l’agriculture à des fins productivistes (utilisation de pesticides et homogénéisation des habitats) a des conséquences catastrophiques sur les populations d’insectes, de reptiles ou encore d’oiseaux. Et cela n’est pas sans impact sur la santé humaine… »

La biodiversité n’est pas un concept abstrait : elle nous entoure au quotidien. Elle est le témoin de l’équilibre des écosystèmes, de notre qualité de vie et de notre santé.